« Cap ou pas cap ? Et tu me poses encore cette question. »
FEAT ; SONECHKA MARGOSHOVITCH & GABRIEL BOTTERO

« Monsieur Bottero, veuillez parler plus fort je ne vous entends pas ! »
« Oui mais je peux pas, c’est un pari avec une amie alors… »
« Votre excuse n’est pas recevable. Je vais être obligé d’enlever des points à… mais… mais que faites-vous ? »

Gabriel s’était soudain levé de son siège et se rapprochait du professeur qui, visiblement, ne comprenant pas tout ce qui était entrain de se passer. Le jeune homme passa derrière le bureau, se pencha vers le professeur et répondit à la question qu’il avait posé précédemment. Ceci fait, il retourna s’asseoir à sa place et sourit de toutes ses dents. Monsieur de La Roche-Guyon se leva alors, légèrement perdu. Il se racla la gorge et annonça que la réponse était juste, donnant des points à Yolihuani. L’homme devait pardonner le Mexicain, il était obligé de se plier aux défis d’une Beauxbâtons un peu folle avec qui il aimait passer du temps. Masochiste sur les bords ? Surement, surtout en connaissant ladite demoiselle qui avait un don pour lui lancer des défis tous plus farfelus les uns que les autres. Étant obligé de murmurer toute la journée durant, il était vrai que d’être assis au fond de la salle n’était pas très pratique, mais fallait faire avec. Toujours aussi fier de son coup, il écouta le professeur continuer son cours lorsqu’une chose étrange se passa. Doucement, toutes les notes qui étaient inscrites sur le tableau depuis le début du cours s’effacèrent et furent remplacées par un message des plus étranges : « Alerte verte, code rouge. J'espère que t'as noté les correspondances, je ne vais pas tout dévoiler à une classe ! Donc - désolée de l'emprunt de tableau, je peux pas utiliser Binocle en cours, qu'on m'a dit -, GROUILLE-TOI, ça gronde, ça tremble et ce qui peut l'apaiser sera disparu dans un gouffre sans fond si t'es pas là dans les dix minutes. P.-S. : si un chat roux te suit, fuit. » Les élèves levèrent des sourcils interrogateurs et ceux qui étaient entrain de s’endormirent furent comme réveillés par une claque invisible. Le professeur croyant qu’il avait enfin l’attention de tous continua son cours de plus belle. Le message s’effaça soudain, faisant place à un second : « J'espère que t'as lu, Noclard, sinon, ça va pas le faire. » Ce fut ce moment que choisit l’homme pour se retourner et faire face à son tableau. Il sembla ne pas comprendre ce qui se passait mais la phrase disparue aussi vite qu’elle était venue et il secoua la tête, pensant surement qu’il avait imaginé toute cette histoire. Il reprit alors son cours mais Gabriel n’était plus là pour l’écouter. Dès lors qu’il avait finit de lire les mots qui s’était affichés, il avait rangé ses affaires à la vitesse de l’éclair et était sortit de la salle sans même que le professeur ne s’en rende compte. Ce qu’il pouvait être stupide quand même, ce Roche de la Guyon.

Le dernier Bottero se baladait donc dans les couloirs vides du château alors que tous étaient encore en cours. Il se dirigea tranquillement vers les cuisines – code rouge – afin de rejoindre une Sonechka affamée – alerte verte. Cependant, il s’arrêta net lorsqu’il entendit un miaulement bruyant. Il pivota lentement sur lui-même et croisa le regard d’un chat aux poils roux. Il grimaça et reprit sa route, regardant derrière lui afin de savoir si l’animal le suivait. Ce qui était le cas. Merde. Il tourna à l’angle d’un couloir et se mit à courir comme un taré, prenant virages sur virages et évitant habilement quelques élèves qui le regardèrent avec un air étrange. Après quelques minutes, il s’arrêta, à peine hors d’haleine et scruta les alentours. Plus de chat. Fier de lui, il reprit le chemin de la cuisine, prenant bien soin de raser les murs, essayant de rester discret – ce qui n’était pas très simple lorsque l’on était Gabriel Bottero, il fallait bien l’avouer. Arrivé devant les portes des cuisines, il les ouvrit et inspira longuement.

Des milliers d’odeurs pénétrèrent son nez et il ne put que sourire. « Monsieur Gabriel ! » L’intéressé se retourna, faisant face à un elfe de maison qu’il connaissait bien de Yolihuani et qui lui courut dans les bras. Le jeune homme le souleva dans les airs et lorsqu’il le reposa, ils firent leur salut : cognement de poing, deux tours sur eux-mêmes, imitation d’un signe, coup de tête, coup de cul. Avec un large sourire, l’elfe retourna à sa cuisine, non sans donner au Mexicain un gâteau au chocolat qu’il appréciait tout particulièrement. S’enfonçant dans la cuisine, il reconnut rapidement la petite tête de la Beauxbâtons et alla s’asseoir à ses côtés : « Je suis làààààà ! Et j’ai semé le chat. Coriace comme bestiole. » Il posa son regard sur la table devant eux et vit une multitude de flans, probablement destinés au dîner du soir. « J’espère que tu as remarqué que je murmure toujours, hein. » Il tripota un des desserts et se tourna vers la demoiselle : « Bon alors vas-y, dis-moi tout. Que dois-je faire ? » demanda-t-il un large sourire aux lèvres. Les défis de Nech étaient surement les meilleurs de l’univers.

Si Gabriel avait lancé une simple excuse à son professeur ? S’il avait inventé un quelconque mensonge qui l’excuserait de suivre la fin du cours ? Pourquoi faire compliqué lorsque l’on pouvait faire simple ? Soit simplement s’éclipser, ses cours sous le bras, sa baguette dans la poche. Ce fut donc discrètement que le dernier Bottero traversa la porte de la salle et qu’il se lança dans les couloirs. Nech l’attendait dans les cuisines et à en juger par son message, elle était affamée. Après avoir tourné l’angle, il s’arrêta quelques instants, histoire de mettre ses affaires dans son sac. Il fit bien attention à ne pas mélanger ses feuilles d’histoire de la magie avec celles de défense contre les forces du mal. Pourquoi ? Simplement parce que la paperasse d’histoire finirait au feu, contrairement à sa collègue qui sera bien rangée dans un carton, au cas où. Le jeune homme se redressa et enfila son sac sur son épaule. Il allait reprendre son chemin lorsqu’un miaulement derrière lui le fit se retourner. Lentement, il pivota sur lui-même et ses yeux croisèrent ceux d’un chat roux. Le chat roux qu’il devait éviter. Oups. Avec des pas les plus naturels possibles (comprenez ici les plus constipés possibles), il s’avança dans le couloir. Le regard qu’il jeta derrière lui se voulait discret (ce qui ne fut bien évidemment pas le cas) et il remarqua que l’animal l’avait suivit. La queue haute, les moustaches frémissantes, le pelage brillant. Gabriel déglutit et, en un clignement d’œil, partit en courant. Ses pieds glissèrent sur le carrelage que la concierge venait tout juste de nettoyer mais cela ne le ralentit pas plus que les menaces que lança cette dernière (à savoir laver le sol avec la langue la prochaine fois qu’elle l’y reprendrait). Tout ce qu’il voulait faire, c’était échapper à ce chat. Il ne se risquait même pas un regard en arrière, manquant déjà assez de se prendre des élèves dans la figure. Il ne s’autorisa une pose qu’après de longues minutes de course folle dans les couloirs. Le souffle court, il regarda autour de lui et sourit grandement lorsqu’il se rendit compte que plus aucun matou ne le suivait. Ouf ! Ce fut donc plus calmement qu’il rejoignit la cuisine, non sans vérifier de temps en temps que la bestiole ne l’avait pas retrouvé.

Dès qu’il ouvrit les lourdes portes, il inspira les odeurs à plein poumons, la joie attachée à son visage. « Monsieur Gabriel ! » Il reconnu immédiatement l’origine de cette voix et ce fut le sourire aux lèvres qu’il prit l’elfe de maison dans ses bras. Ils s’étaient connus à Yolihuani. Gabriel avait l’habitude de passer par les cuisines avant d’aller se coucher, histoire d’avoir droit à une petite pâtisserie avant de rejoindre Morphée. L’elfe, d’abord réticent au fait de voir un élève entrer et sortir de sa cuisine comme d’un moulin, avait finit par apprécier le Mexicain. Ils leur arrivaient de passer une ou deux heures ensemble, goûtant les plats et découvrant des recettes inconnues. Leur salut était unique et assez amusant à voir en raison de leur différence de taille. Ce fut avec un gâteau au chocolat que le jeune homme rejoint Nech et s’assit à ses côtés. « Je suis làààààà ! Et j’ai semé le chat. Coriace comme bestiole. » « Bastet ? » demanda-t-elle en jetant des regards autour d’elle. « Euh… j’lui ai pas demandé son nom. J’aurais dû ? » « J'espère bien que tu l'as s'mée, sinon, on est marron. » Le Bottero ne put retenir un large sourire devant l’expression que son amie venait d’utiliser. « Elle est stressante, dans son genre, franchement. J'avais perdu le fait de me faire ainsi fliquer indirectement par mon frangin. » Gabriel ne releva pas, trop conscient de ce que c’était que de se faire surveiller toute la journée par son aîné. « Toujouuuuuuuurs se méfier des machins roux, tou-jours. » Il posa un regard sur la tignasse carotte de la Française et répondit, le plus sérieusement du monde : « Ouais, sont bizarre les roux, ils cachent toujours des trucs. » Il retira le sac de ses épaules et se retourna vers la rouquine, fier de lui : « J’espère que tu as remarqué que je murmure toujours, hein. » « Ah oui, » répondit-elle simplement, soudainement plus fort. Gaby se renfrogna légèrement, il aurait bien aimé un petit compliment quand même, c’était pas facile tous les jours de passer son temps à parler tout doucement. « Ça a été en cours ? Avec mon oncle aussi ? » Il leva les épaules : « Bah tu sais, c’était chiant. Enfin j’veux pas dire que ton oncle il est chiant, hein ! Juste que… fin histoire de la magie, quoi… » Applaudissez ce rattrapage de fifou, merci, c’était pas le genre de truc qui lui arrivait souvent. Pour rattraper le coup, ou simplement parce qu’il avait envie d’encore plus de challenge (avec ze accent frenchie s’il-vous-plaît, merci) il demanda, histoire de changer de sujet : « Bon alors vas-y, dis-moi tout. Que dois-je faire ? » En dehors du fait que Nech était la maîtresse des défis les plus magnifiques de l’univers, elle avait également un don pour en trouver des simples aussi facilement que des compliqués. Elle pointa les assiettes de flan qui se trouvaient sur la table devant eux : « Cap de gober un flan à la minute en chantant un morceau de la Marseillaise entre chaque fournée ? » « Cap ! » Non, il n’avait bien sûr pas écouté la fin du pari et ce fut donc en fronçant les sourcils qu’il demanda : « La Marseillaise ? C’est quoi ça déjà ? Le truc avec la reine ? Ah nan, ça c’est Good Save the Queen… Aaaaaaaaaaaah ! Si j’men souviens ! C’est enfants de la patrie je sais pas quoi ? Nan… ? » Il ne s’était pas amusé à apprendre les hymnes nationaux de tous les pays par cœur et personne ne lui avait proposé le défi, il avait une excuse. « Mais d'abord, connais-tu les bonnes techniques de gobage de flan ? » Feignant un air indigné il répondit, avec une voix des plus aristocratiques : « Môa ? Je suis un pro du gobage, môdame ! » Et, joignant le geste à la parole, il se pencha sur l’assiette qui était juste en face de lui. En une inspiration, le flan passa de son plat à sa bouche et il l’avala avant de faire une mini révérence. « La question est, connais-tu les bonnes techniques de gobage de flan ? » demanda-t-il en pointant son doigt sur le nez de Nech. Parce que oui, tel était la question.

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Le regard gourmand et avide lancé par la rouquine au dodu gâteau au chocolat se ternit dans l’instant lorsque l’Animal fut mentionné. Bastet était une traqueuse émérite, la savoir dans les parages causait irrémédiablement un certain effroi. ♦.♦.♦ Euh… j’lui ai pas demandé son nom. J’aurais dû ? ♦.♦.♦ Nooon, malheureux ! La semer, c’est tout ce qui compte. ♦.♦.♦ Asséna la Beauxbâtons d’un ton sans appel. Ja-mais il ne fallait tenter le diable roux, le pire de tous les démons. ♦.♦.♦ Ouais, sont bizarre les roux, ils cachent toujours des trucs. ♦.♦.♦ Ouais même si tous ne planquent pas leur nature méphitique. Bastet a déjà montré au monde à quel point elle puait les enfers. ♦.♦.♦ Affirma-t-elle. Ne vous méprenez pas, la rouquine avait beaucoup d’affection pour cette chatte. Bien planquée sous les râleries, les remarques, les plans farfelus tramés à toute heure du jour pour lui échapper et les nombreuses divagations quant à la noirceur de sa nature profonde.

Abandonnant le murmure mimétique pour retrouver une voix normale, la Franco-russe s’enquit des nouvelles de Gabriel et de sa survie au cours d’histoire. ♦.♦.♦ Bah tu sais, c’était chiant. Enfin j’veux pas dire que ton oncle il est chiant, hein ! Juste que… fin histoire de la magie, quoi … ♦.♦.♦ Hérétique, siffla-t-elle avec désapprobation, magie noire, ça sert à rien mais ça, c’est épique, franchement ! Comment tu peux ne pas aimer un cours où on te raconte des histoires ? ♦.♦.♦ Avec la sorcière, on aurait presque pu renommer la matière « cours de contes et légendes » ou « cours de narration antique ». Ou encore « notre passé en récits ». Ecouter quelqu’un parler de batailles, d’épopées ou de croisades, ça n’avait pas de prix. Surtout quand son oncle était aux commandes. Enfin, ils n’allaient pas s’étriper, bien sûr, ils devaient régler leur compte à ces flans en priorité. ♦.♦.♦ Cap ! ♦.♦.♦ Une moue appréciatrice se peignit sur les traits de la demoiselle avant que Gaby ne reprenne la parole afin d’obtenir quelques éclaircissements. ♦.♦.♦ La Marseillaise ? C’est quoi ça déjà ? Le truc avec la reine ? Ah nan, ça c’est Good Save the Queen… Aaaaaaaaaaaah ! Si j’men souviens ! C’est enfants de la patrie je sais pas quoi ? Nan … ? ♦.♦.♦ Ouais, c’est ça, l’hymne français ! Tu la connais en entier ou ‘faut t’l’apprendre ? ♦.♦.♦ S’enquit-elle, prête à jouer les professeurs occasionnels si c’était la condition pour une réussite de la mission. Non, elle n’avait pas envie que le gobage de flan soit doublé d’un mixage d’hymnes douteux. UU

D’ailleurs, on était sûr qu’il s’y connaissait en gobage de flans, le Noclard ? ♦.♦.♦ Môa ? Je suis un pro du gobage, môdame ! ♦.♦.♦ Je veux bien voir ça. ♦.♦.♦ Railla sciemment Nech pour le titiller, curieuse de voir comment il se débrouillait. La performance étant sans faille, la Franco-russe applaudit avec plaisir, prête à lancer le chrono du reste de l’opération. ♦.♦.♦ La question est, connais-tu les bonnes techniques de gobage de flan ? ♦.♦.♦ Ecarquillant les yeux, Sonechka eut une moue faussement vexée à cette question déplacée. ♦.♦.♦ Genre je pourrais ne pas les connaître, s’indigna-t-elle théâtralement, attends, tu vas voir, mon vieux Cycle. ♦.♦.♦ Déclara-t-elle avant de se lever d’un bond. Oui, « Gabicycle », tout à fait, elle faisait ce qu’elle voulait. UU Tout comme il était parfaitement normal qu’elle cherche une serviette en tissu tout en s’excusant maintes fois auprès des elfes d’ainsi les déranger.

Une fois l’objet en sa possession, Sonechka l’étala sur la table, y glissa délicatement le flan, reprit la serviette entre ses doigts, se positionna bien droite et dans le bon axe pour son opération. Elle tira d’un coup sec pour tendre le tissu et le flan se la joua fusée, fendant l’air avant qu’elle ne vienne le gober en plein vol avec adresse. S’essuyant les commissures d’un revers de poignet, la Beauxbâtons reprit. ♦.♦.♦ Alors, vieux, ça c’est pas du gobage de compét’ ? ♦.♦.♦ Fière ? Evidemment !

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