Un match de quidditch… Enfin un nouveau. Voilà qui avait tout pour plaire à notre chère roumaine préférée. Oui mais voilà… Contre des vieux ! Certes, elle avait l’immense honneur de faire partie de l’équipe représentante des élèves mais… Jouer contre des vieux débris croulants. Est-ce qu’ils se souvenaient encore des règles au moins, tous ces ancêtres ? Et puis bon, qu’on se le dise, la forme physique ne devait vraiment pas être leur force. Enfin après tout… Quelle pourrait être cette force hein ? L’expérience ? A d’autres… Ils étaient peut être expérimenté, mais rien ne lui ferait dire autre chose que ça ne suffirait pas. Pas contre eux. Pas contre elle surtout…

Chevauchant son balai, au sol, alors que le coup d’envoi n’était pas encore donné, la jeune brune regardait tout autour d’elle. Elle fixait chacun des visages des professeurs et autres vieux dans l’équipe d’en face. Aucun ne semblait une réelle menace. Après tout, les deux seuls vrais joueurs de quidditch étaient incapables de jouer maintenant alors… C’était du tout bon pour eux. Finalement, son regard s’égara au loin, elle cherchait Gabriel, bien malgré elle. Comme si elle avait besoin de ça pour se concentrer. Retenant un juron sonore, Billie se décida donc finalement à fixer ses mains, au bout du balai, pour éviter de se perdre en regards inutiles. Elle n’avait décidemment pas besoin de ces pensées parasites. Elle devait briller de nouveau, pour Luce, qui était bien loin, toujours malade, peut être même déjà morte… Un long frisson la prit à cette pensée et elle se força pour penser à tout autre chose. Comme la nouvelle figure qu’elle avait appris à l’entrainement. Ou comme le souaffle allait forcément arriver entre ses doigts lorsque le coup d’envoi serait donné.

Maintenant bien concentrée sur des pensées uniquement quidditchienne (*ou comment placer le mot chienne de façon tout à fait discrète…*), la brunette observa l’arbitre Kiely relâcher le vif d’or, qui espiègle, vint taquiner les deux attrapeurs, ainsi que les deux cognards, qui semblaient encore plus agressifs que d’habitude, avant de finalement déposer son regard sur la balle rouge vif. La seule qui l’intéressait réellement. La seule qu’elle poursuivrait avec ardeur et dévouement. La seule qui pourrait l’empêcher de penser à autre chose. Enfin, la balle s’élança dans les airs et Billie suivit le mouvement, le plus rapidement possible. Cette balle était à elle, et rien qu’à elle. Les yeux toujours fixés sur la balle, elle ne se préoccupait de rien. Ni de ses coéquipiers, ni de ses ennemis. Juste la balle, rien d’autre…

Au bout d’un temps qui lui sembla interminable, les doigts de la brunette se refermèrent sur la sphère et elle s’empressa d’effectuer un demi-tour, pour éviter les poursuiveurs adverses, qui lui fonçait dessus. Maintenant, elle devait se concentrer sur ses alliés, sur le mouvement de ses adversaires. Après un rapide regard, elle observa le grand balourd, qui se plaçait plutôt bien. Bien, sa première passe serait donc pour lui. Elle feinta donc pour la lancer sur son deuxième poursuiveur, avant de finalement passer la balle à Luis, avec une confiance débordante. Ce match commençait très bien, il n’y avait pas de raisons pour que ça ne soit pas le cas sur la durée…

Le monde tel qu'elle l'avait connu jusque là n'était plus. Tout avait changé, tout s'était écroulé, et pourtant, elle avait encore de quoi s'accrocher, même seulement de quelques doigts, au rebord de sécurité, lui permettant de ne pas sombrer dans les abysses qui l'attiraient pourtant depuis des mois. Il y avait Eterna, Istvan, Natalia, mais aussi celui qui se tenait debout, une dizaine de mètres sous elle, et les quelques heures qui allaient suivre. Le quidditch, le vol. Une passion partagée avec son directeur de thèse, et pour le moment, rien ne pouvait la combler plus que cet aparté, comme des parenthèses dans une vie qui était devenue insoutenable. Elle essaierait encore une fois d'oublier, le temps de quelques heures, la pression qui l'empêchait de vivre. A présent, elle était dans les airs, à attendre le lâché des balles, comme on lâchait les fauves dans une arène. Pourtant, et elle le savait, elle serait loin de ressentir l'effroi que ressentaient les gladiateurs lorsqu'ils voyaient leur adversaire sauvage les rejoindre dans le sable. Ici, ce qu'attendait Sara, c'était un sentiment de liberté et de bien-être, comme autrefois. Cette impression que tout irait bien quoi qu'il arrive, que la vie était légère, aussi légère que ses fesses sur son balai, et que rien ne viendrait plus troubler cette sensation de douceur que provoquait le vent frais qui venait épouser les courbes de son visage. Elle souhaitait aussi, quelque part, savoir qu'elle était toujours celle qu'elle avait été, malgré ce qu'elle avait traversé. Que quelque part, cette Sara d'autrefois était encore enfouie quelque part en elle, et qu'elle lui ferait honneur en aidant coûte que coûte à mener son équipe des vieux singes à la victoire. Elle voulait se le prouver à elle, elle voulait le prouver à Gregori, même s'il ne la voyait pas. Elle voulait le montrer à Sean, à Eterna, à Istvan, à Natalia... elle voulait ressentir à nouveau cette ferveur, cette passion, qui la faisaient autrefois vivre avec une telle intensité que le bonheur aurait alors pu la tuer, elle serait morte heureuse. Voilà ce qu'elle voulait vivre, ressentir. Et c'est d'un regard à la fois lourd de chagrin et ampli d'espoir qu'elle regarda Sean ouvrir le coffre, relâchant alors vif et cognards, auxquels elle ne prêta guère attention, son regard appuyé sur la dernière balle que tenait son directeur de thèse. Le souafle... La seule balle dont elle devrait se préoccuper, elle, poursuiveuse. Et après un regard bref à Istvan, Eterna et Jude, qui, pour son plus grand bonheur, faisaient partie de son équipe, Sara ... se gratta le nez. En regardant Sean, bêtement. Oui, bêtement, c'était le mot. Avant de réaliser qu'il allait lancer le souafle. C'était le moment pour commencer à briller...

... mais elle ne brilla pas à ce moment-là. Pas plus que Jude, qui se tenait non loin d'elle. C'était une étudiante au nom trop compliqué pour être retenu qui attrapa le souafle. Mais ce n'était que le début... Et Sara, tout comme Jude, elle le savait, ne comptait pas se laisser faire de la sorte. Pas plus qu'elle n'avait laisser cette paire de botte à une concurrente le premier jour des soldes, quelques années plus tôt. Lorsqu'elle voulait quelque chose, elle se battait pour l'avoir. Et ce n'était pas parce qu'elle était en face d'étudiants qu'elle comptait se ramollir. Ils prouveraient à tous ceux qui pensaient que l'équipe des vieux, comme elle en avait surpris à les appeler, ne feraient pas le poids, qu'ils avaient totalement faux. Et quelque part... et bien, elle n'oubliait pas que, des mètres en contrebas, Sean Kiely les regardait tous. Y compris elle. Et ce n'était qu'une motivation supplémentaire. Elle ne prêta pas attention à Swightberry, qu'elle devinait dans le coin des anneaux, pas plus qu'elle ne cherchait à savoir où se trouvait Hullington, sans doute déjà à la recherche de la petite balle dorée. Et elle se mit à foncer vers la brunette qui s'était accaparée le souafle, prête à le lui arracher des mains, avant de réaliser qu'elle allait le lancer à un de ses coéquipiers, son petit frère de cœur... Avec un sourire déjà victorieux, Sara suivit le mouvement de l'étudiante, concentrée, observant ses moindres gestes, en attendant le moment opportun, qui ne tarda guère à venir... Il fût alors temps pour elle d'attraper la balle rouge, fonçant entre les deux poursuiveurs de l'équipe adverse dans un timing parfait. S'accrochant solidement à la balle, elle se mit à observer partout autour d'elle, comme à chaque fois que c'était elle qui la portait. Lorsque l'on a pas la balle, c'est sur elle que l'on se concentre pour la rattraper, mais lorsqu'on l'a... alors, il faut faire attention à tout ce qui nous entoure. Cognards, joueurs adverses comme alliés... Tout pouvait compter. Et elle continua à voler dans son élan, enchainant une tremblante de Woollongong des plus rapides et une feinte de Porskoff revisitée qu'elle destinait à Jude. Elle lui en avait touché un mot, à elle ainsi qu'au troisième poursuiveur, avant de rentrer sur le terrain, espérant s'allier à eux pour mener leur équipe à la victoire. Et, au lieu de lâcher le souafle au joueur qui, elle l'espérait, s'était installé en-dessous d'elle pour servir de feinte, Sara lança finalement le souafle au-dessus d'elle, à l'attention de l'américaine. Jude, c'est à toi... Marque-nous un but.

Ses grands airs rehaussés par un sourire ultrabright, Fedor posa une unique fesse sur le manche de son balais et prit une pose de superhéros en prenant son envol, poing en l'air. Il adressa des petits clins d'oeil aux pompons girls et fit un tour de terrain le torse bombé pour le spectacle. Lui, en faire trop ? Déjà, il n'avait pas mis sa cape rouge, alors que ça aurait été sacrément classe quand de l'entendre claquer au vent, alors ne lui en demandez pas trop ! Eterna s'était moquée de lui quand il avait débarqué en costume de Superman alors il s'était résigné - avec une moue de chien battu - à enfiler son banal uniforme assorti au reste de son équipe. Il n'avait jamais su se fondre dans la masse, de toute manière, et il était bien trop heureux d'avoir l'occasion d'être acclamé pour bouder bien longtemps.

Occupé à chercher Louka dans les gradins pour faire quelques loopings au dessus de sa tête, il manqua le coup de sifflet et le début de l'action, c'est donc à la traîne qu'il rattrapa ses coéquipières après une accélération un peu trop poussée ... Qui le fit dépasser Jude alors que Sara la visait du souafle qui lui atterrit en plein dans l'épaule. Rabattant une main sur la balle rouge, il la cala contre son flanc en adressant un petit sourire d'excuses aux deux poursuiveuses surprises dont il venait de changer la stratégie. Enfin, tant qu'ils conservaient le souafle, c'était déjà ça de pris, non ? Il remarqua alors que la défense aussi n'avait pas vu venir son intervention et que personne ne le talonnait, ses deux autres coéquipières étant elles marquées de près. Cabotin, il décida alors de partir en flèche vers les anneaux. Il avait le champ libre, pourquoi s'en priver, hein ?

Le vent lui fouettait le visage et il aurait bien lancé une petite boutade sur son air super-lifté s'il n'avait pas dû se concentrer sur son tir. Le grand dadais de l'équipe des jeunots lui jeta un regard de défi depuis le centre et il ne lui en fallut pas plus pour armer, cibler et jeter le souafle de toutes ses forces dans l'anneau de gauche en lui renvoyant son si célèbre air arrogant. Il croyait pouvoir l'arrêter ? Et bien qu'il essaye !

L'été avait été rude et l'automne ne s'annonçait pas plus réjouissant pour Eden avant l'annonce du retour de la saison de Quidditch. C'était bien la chose - après sa fiancée, bien entendu - qu'Eden aimait le plus au monde. Retrouver ses anciens coéquipiers et son cher capitaine - et meilleur ami - sur le terrain avait été une réelle bouffée d'oxygène. Après la tourmente, enfin la détente ! Le sourire qu'il portait aujourd'hui était donc sincère et non surjoué, comme il avait si souvent dû se forcer à en décocher ces derniers temps pour donner le change. Devant ses anneaux, dans les airs, avec le ciel bleu au dessus de sa tête et les cris enthousiastes de ses amis depuis les gradins, le Texan se sentait bien. Captain' les avait brieffé rapidement dans les vestiaires sur le fairplay de mise et ils avaient rigolé en rétorquant qu'il n'y avait pas à s’inquiéter, ils ménageraient "les vieux" ! En plus, avec Declan Swightberry en opposant direct de l'autre côté du terrain, il avait beaucoup à prouver. Ils s'étaient lancés des piques toute la semaine avec une complicité évidente et c'était dans cette ambiance bonne enfant que se jouerait la rencontre.

Après un dernier baiser à Gwendolyn, il avait enfourché sa monture et s'était rendu directement à son poste, confiant. Le premier lancer leur avait donné l'avantage mais rapidement, les vieux avaient montré qu'ils n'étaient finalement pas si rouillés et retourné la situation. Une bourrasque rabattit ses cheveux un peu trop longs en arrière alors que l'infirmier prit les devants et se retrouva rapidement devant lui. Eden ne cilla pas, il se contenta de lancer un regard animé par l'envie de vaincre à Luis qu'il reporta sur l'adversaire, les yeux pétillants. Le souafle partit si vite qu'il eut à peine le temps d'anticiper et se jeta sur le côté. Ce serait sa première action et il était hors de question de commencer sur une fausse note... Il ne marquerait pas. Le souafle ne passerait pas.